LA MALADIE DE SEVER ou APOPHYSOSE POSTERIEURE DU CALCANEUM
La maladie de Sever est une apophysose de croissance qui touche les enfants de 8 à 15 ans (11 ans en moyenne).
Même si elle est très fréquente, l’incidence réelle de la maladie, qui touche autant les filles que les garçons, reste inconnue.
Elle appartient au groupe des ostéochondrodystrophies extra-articulaires ou apophysoses, dans la classification de Siffert.
Elle fut décrite vers 1912, et doit être considérée non pas comme une maladie de la croissance mais comme une vraie maladie du sport de l'enfance !
Comment la maladie se développe-t-elle ? (physiopathologie)
Elle est secondaire à deux phénomènes
:
• aux forces de traction exercées
par l’insertion distale du muscle triceps sural (par l’intermédiaire
du tendon d’Achille), et par l’insertion proximale des
muscles courts fléchisseurs plantaires.
• aux microtraumatismes répétitifs
liés aux chocs d’appui du talon au sol pendant la marche,
la course et les réceptions de sauts.
Schéma anatomique des attaches tendineuses sur le calcanéum (os du talon).
Quels sont les signes d'appel de la maladie de Sever ?
La
maladie de Sever se manifeste par des douleurs
de talon (talalgies) d’apparition progressive, survenant
pendant les activités sportives ou au décours de celles-ci.
Les douleurs sont mécaniques, augmentées par l'effort
(sports, jeux) et calmées par le repos.
L’évolution se fait vers une aggravation en intensité
de douleur ou en facilité d’apparition (pendant des exercices
de moins en moins sportifs, puis pendant des activités de la
vie quotidienne).
Les douleurs ne sont jamais nocturnes, par contre, elles peuvent s’accompagner
d’irradiations vers le tendon d’Achille
ou la région plantaire.
Douleurs et irradiations douloureuses de la maladie de Sever
Comment faire le diagnostic de maladie de Sever ?
Même si une douleur mécanique du ou des talons en cours de croissance évoque une maladie de Sever, l'examen clinique reste impératif.
L’examen clinique permet
d’apprécier :
L’intensité
de la douleur :
marche normale, boiterie d’évitement
plus ou moins importante, impotence fonctionnelle totale.
Les
troubles de la statique du pied
(au podoscope) en particulier un valgus
calcanéen.
L’amplitude
articulaire le la cheville
en flexion (dorsale), témoin de
la longueur du tendon d’Achille.
Les
angles poplités
qui reflètent la raideur des chaînes musculaires postérieures
(muscles ischio-jambiers, système suro-achilléo-calcanéo-plantaire).
Mesure
de l'angle poplité (méthode anglo-saxonne) : patient en
position allongée, muscles totalement DECONTRACTES, l'examinateur
lève doucement la jambe en direction du plafond au maximum des
possibilités. L'angle entre cette position maximale d'élévation
de la jambe et la verticale représente l'angle poplité.
Plus il est grand, plus le patient est raide.
La douleur provoquée
par la palpation des faces latérales, postérieure et inférieure
du talon.
Quels examens complémentaires demander devant une maladie de Sever ?
Le seul examen utile est la radiographie.
Bilan radiologique
Les incidences radiologiques de base sont les suivantes
:
Radiographie
de la cheville et du pied de profil avec comparatif
Ce bilan radiologique est le plus souvent normal.
Son rôle est surtout d'éliminer d'autre causes de douleurs (en priorité les tumeurs).
Elle s’impose au titre du diagnostic différentiel, même si la symptomatologie et l’examen clinique sont fortement évocateurs du diagnostic.
Les autres examens (scintigraphie osseuse, tomodensitométrie, remnographie) n’ont aucune utilité pour le diagnostic positif ni dans le bilan de la maladie.
Quel sont les diagnostics différentiels de la maldie de Sever ?
Les principaux diagnostics différentiels à éliminer sont :
Les pathologies tumorales malignes et bénignes
Sarcome d’Ewing Kyste osseux anévrysmal du calcanéum |
Les pathologies infectieuses
Ostéomyélite du calcanéum |
Les pathologies macrotraumatiques
Fracture du calcanéum Fracture du calcanéum |
Les pathologies microtraumatiques
Fracture de fatigue du calcanéum |
Les pathologies malformatives
Synostoses du tarse Synostose du tarse entre talus (astragale) et calcanéum |
Les pathologies rhumatismales
Arthrite chronique juvénile Rhumatisme psoriasique Spondylarthrite ankylosante |
Les pathologies des parties molles
Bursite rétrocalcanéenne |
Les pathologies cutanées
Verrues
|
Comment traiter une maladie de Sever ?
En phase aiguë de la maladie
La phase aiguë passée, le traitement habituel peut être poursuivi.
Le repos sportif
La maladie de Sever doit être considérée
comme une maladie du sport, et non comme une maladie de la croissance.
Trop souvent, il est conseillé d'attendre en imposant le seul
repos sportif, qui à lui seul ne règle pas le problème
de fond de la raideur tendino-musculaire.
Le repos sportif scolaire et extra-scolaire
est donc indispensable et non négociable.
Le sport le plus déconseillé est certainement la course d'endurance.
Les antalgiques et anti-inflammatoires
La douleur doit être maîtrisée pour permettre un appui du talon au sol et éviter une attitude antalgique de marche sur la pointe du pied, qui ne fera qu'aumenter l'intensité douloureuse en créant un véritable cercle vicieux.
Il faut diminuer cette douleur de façon médicamenteuse par traitement (oral) antalgique et anti-inflammatoire.
Les pommades en application locale n'ont aucune efficacité.
Les talonnettes amortissantes
L’utilisation
de talonnettes ou semelles amortissantes visco-élastiques pour
limiter les microtraumatismes par chocs lors des activités
de la vie quotidienne et les activités de jeux, apporte souvent
une amélioration.
Ce traitement ne corrige pas le problème de fond de la raideur
tendino-musculaire.
L'adaptation du chaussage
L’adaptation du chaussage pour corriger un trouble d’appui important ou une zone de frottement appuyé peut soulager les douleurs, mais ne corrige pas le problème de fond de la raideur tendino-musculaire.La kinésithérapie
Elle est fondamentale pour diminuer les forces de traction du tendon d'Achille sur le cartilage de croissance postérieur du calcanéum.
Elle doit associer différents aspects.
Les étirements myo-tendineux chez le kinésithérapeute
Ils représentent la part la plus importante du travail de kinésithérapie.
Il doivent être réalisés de façon régulière, au rythme de 2 séances par semaine, chez le kinésithérapeutre et par le kinésithérapeute (exercices passifs).
En effet, l'intérêt d'aller en cabinet de kinésithérapie est de pouvoir faire les exercices d'étirements à 2 personnes. Les étirements que l'on peut réaliser tout seul (individuels) peuvent être réalisés au domicile !
Ces étirements passifs nécessitent donc la présence et la participation du kinésithérapeute du début à la fin de chaque séance (qui doit durer au moins 30 minutes).
Les étirements myo-tendineux à domicile
Le travail d'étirement sera d'autant plus efficace
qu'un complément d'étirement par exercices actifs sera
réalisé TOUS les SOIRS à domicile, ce qui représente
un investissement important, en temps et en motivation.
Réaliser 10 minutes d'exercices chaque soir est un minimum.
Ces exercices individuels doivent être faits de façon efficace,
et le kinésithérapeute doit montrer comment les réaliser.
Comment éviter la récidive de la maladie de Sever ?
Après guérison, il est possible d'éviter la récidive de la maladie de Sever.
Par l'entretien de la souplesse des membres inférieurs
Pendant la phase de croissance, il est naturel de perdre de la souplesse, surtout par le facteur d'accroissement de longueur des os.
La réalisation régulière d'exercices
d'étirement à domicile permet donc d'éviter de
perdre le travail réalisé en kinésithérapie.
A condition de réaliser régulièrement 2 séances
de stretching par semaine.
Par la modification des pratiques sportives
La réalisation d'exercices d'étirements doit encadrer TOUTE activité sportive.
Malheureusement, ceci est rarement enseigné dans le milieu sportif scolaire, et seuls quelques disciplines extra-scolaires appliquent cette procédure avec rigueur (gymnastique, sports de combat, danse classique, hip-hop).
Le sport se réalise idéalement de la façon suivante :
15 minutes d'échauffement SANS JAMAIS COURIR, axé sur le travail articulaire proprioceptif
30 minutes d'étirements activo-dynamiques
la phase sportive proprement dite
15 minutes d'étirements (stretching postural) à la fin de la phase sportive
Ceci est valable quel que soit l'âge et quel que soit le sport envisager, même pour la natation, le ski, l'équitation !
L’évolution de la maladie de Sever se fera dans tous les cas vers la guérison, soit de façon thérapeutique, soit de façon naturelle par fermeture du cartilage de croissance postérieur du calcanéum vers l’âge de16 à 18 ans.
Mais attention, sans prise en compte du facteur hypertonie tendino-musculaire, il est possible de voir disparaître la maladie de Sever de l'enfance au profit d'une tendinite du tendon d'Achille de l'adulte, véritable pathologie miroir après maturation osseuse.